Oui pour la vie

Le mariage : une bonne nouvelle

Homélie

Homélie du mariage

Stéphane et Laurence, aujourd’hui vous vous lancez dans le mariage. Vous allez vous demander mutuellement si vous voulez être l’un pour l’autre comme mari et femme, et vous vous déclarerez que vous vous donnez et recevez l’un l’autre ; et en le disant, vous le ferez ; ce sera une parole qui réalise ce qu’elle dit, au cœur du sacrement de mariage. Cette parole que vous échangez est une parole bien épaisse, puisqu’elle est appelée à durer toujours. Et même, à grandir jour après jour. Une parole, c’est tout petit une parole ; il y a même parfois des paroles en l’air. Mais cette parole-ci, elle sera une fondation ; vous devrez y revenir souvent. « J’ai promis de l’aimer toujours » ; « tu as promis de m’aimer toujours ». Parfois on entend dire que la plus belle preuve d’amour serait de redonner sa liberté à celui qui veut quitter le couple ; mais non, au contraire ! La plus belle preuve d’amour est de lui redire : tu as promis de m’aimer toujours, et moi je veux croire à la parole que tu as dite.

On pourrait accueillir la parole de l’évangile d’aujourd’hui comme une sorte de charge, de contrainte ; mais cette parole — ce que Dieu a uni, que l’homme ne le sépare pas — exprime plutôt la beauté de l’amour et la confiance que Dieu nous fait. Lui l’inventeur de l’amour est capable de l’accompagner et de le sauver au point que toutes les forces qui nous feraient renoncer à un amour durable peuvent être dépassées.

A cause de l’amour qui s’installe entre l’homme et la femme, « l’homme quittera son père et sa mère… », nous dit Jésus. La femme aussi, du reste. Le lien qui unit les conjoints leur fait larguer les amarres d’avec leur vie précédente, quitter les vues des parents qui pourtant les ont tant et bien façonnés , pour construire à deux quelque chose d’original, un amour pour la vie.

Faire grandir un amour fidèle est vraiment une création de chaque jour. On pourrait se demander : comment peut-on promettre d’aimer toujours ? L’amour n’est-il pas un sentiment, et donc incontrôlable ? Et s’il venait à passer ? Il y a une dimension de l’amour que l’on a oublié de nos jours, et qui est pourtant si importante. L’amour est choix, il est décision. Cela paraît étrange à dire, et pourtant l’amour ne repose pas seulement sur le sentiment mais aussi sur la volonté. On ne le sait plus dans notre monde, on croit que l’amour dure tant que dure le sentiment. Mais non, l’amour est aussi choix, décision. Dans un couple il arrive des moments où le sentiment n’est plus au rendez-vous. Par exemple, vous pourrez tomber amoureux de quelqu’un d’autre — cela n’est pas si rare — mais ce n’est pas la fin de votre couple. Dans toutes les situations où le sentiment semble en panne, on peut encore choisir d’ouvrir son cœur à son conjoint, de le prendre dans son cœur, de vouloir lui être uni. Non par nécessité, non par peur d’être seul, non par soumission, mais par choix. Lorsqu’on fait cela, un sentiment nouveau commence à naître, plus profond, un attachement qui donne davantage la vie. L’amour devient un sentiment plus profond, qui n’est pas né seulement tout seul, comme quand on tombe amoureux, mais qui est né du désir de notre cœur, de la décision de notre cœur. Bien sûr, si je voulais dire « je décide d’avoir des sentiments pour toi » et que je voulais les ressentir instantanément, ça ne marcherait pas ; mais quand notre sentiment premier est en panne, dire dans son cœur à son conjoint « je te choisis » peut en quelques jours, semaines ou mois, produire un attachement nouveau et plus puissant. Ainsi je vous demande de choisir de vous aimer, quels que soient vos états d’âme. Heureux ceux qui peuvent, du fond de ce choix renouvelé dans leur cœur, laisser retentir cette parole du Cantique : mon bien-aimé est à moi et moi je suis à lui.

Ce choix d’aimer, il y a un moment où il est spécialement fort, c’est le jour où nous avons à pardonner à notre conjoint une attitude, une parole, une réaction ou un silence… Tout au long de votre vie vous aurez à vous pardonner l’un à l’autre. Sur la terre, il n’y a pas d’amour parfait, irréprochable. L’amour que l’on s’échange sur terre est un amour à pardon, comme il y a les moteurs à essence. Notez que pardonner, ce n’est pas excuser ; on peut très bien pardonner à quelqu’un qui est inexcusable. Parce que pardonner n’est pas dire : je te comprends, je vais essayer d’oublier… Pardonner, c’est dire à l’autre : même si tu m’as fait si mal, je veux t’aimer par-delà ce que tu m’as fait, je ne veux pas que ta mauvaise action limite mon amour. Pardonner, c’est faire remporter une victoire à l’amour.

Votre amour est cher au Seigneur, et il le sauvera autant de fois qu’il le faudra, par son pardon et la force de son Esprit. Dans le mariage, Dieu consacre votre amour et il compte sur lui pour le progrès de son Royaume. Le Royaume qui a pour loi l’amour entre les personnes est si désirable. Il y a beaucoup d’événements ou de façons de regarder le monde qui nourrissent en nous la peur ou le cynisme. Bien des contemporains sont tentés par le repli sur soi, par le désir de se protéger et de s’assurer un avenir individualiste. Or, contrairement aux apparences, ce n’est pas la puissance ou l’argent ou le plaisir qui sont le fondement du monde, mais c’est l’amour, l’amour comme don. Par ceux qui sont mariés, s’ils vivent à fond leur vocation, Dieu fait comprendre aux hommes que c’est la tendresse et la fidélité qui sont le vrai fondement du monde. Il y a un besoin urgent de ce témoignage. Merci à vous de le donner !

Par votre amour vous nous témoignerez aussi de la qualité de l’amour de Dieu. Le couple marié représente au milieu du monde la force et la fidélité de l’amour de Dieu pour les hommes. Dieu aime les hommes d’un amour passionné et qui ne se reprend pas. C’est pourquoi aussi le mariage chrétien ne se reprend pas et que l’Église ne connaît pas de moyen de faire cesser un mariage valide pour que les époux retrouvent leur liberté. Il arrive même qu’un conjoint devenu seul choisisse de vivre encore cette fidélité qui vient de plus loin que lui.

Le couple marié témoigne aussi de l’amour de Dieu en faveur de tous ceux qui ont tant besoin d’amour, et votre foyer réchauffera tous ceux qui ont été blessés par l’amour et qui veulent reprendre un chemin de vie.

Pour vous aimer chaque jour davantage, il y a des moyens humains décrits dans quelques petits livres formidables en vente dans toutes les bonnes bibliothèques, et que je vous encourage à lire — surtout les hommes ! Et puis il y a des moyens spirituels : votre amour vivra en recevant la sève de l’amour du Christ pour vous. Faites-vous pauvres, demandez souvent à Dieu de faire grandir votre amour. Sans lui vous ne pouvez rien faire ; avec lui vous pouvez tout.

Que Dieu vous garde et vous fortifie encore !

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